samedi 26 février 2011

WWOOF 3 : La belle Auriole

Salut,

Voici un résumé de mon passage à la belle auriole (.fr)


Le lieu :
Opoul, bled au Nord des PO, presque dans l'Aude. Le Mas est à quelques km du village.
Plus de 30 ha de terres : forêt, vigne, garrigue, champs ... 800 m² de surface habitable en deux bâtiments, ce qui fait un assez gros truc.
Je pense que la commune d'Opoul est composée à 80% de cailloux (différents calibres disponibles), les 20% restants c'est des buissons qui piquent ; une sorte de désert. Opoul c'est entre Perpignan et Narbonne, donc tramontane un jour sur deux, et quand ca souffle, un jour sur deux c'est a 100 km/h. Le bon côté c'est que le vent éloigne les moustiques.
Evidemment j'en rajoute un peu, le mieux pour se faire une idée c'est de regarder le site plein de belles photos.

Le projet :
Atteindre l'autonomie maximale. Eau et énergie c'est bon : y'a des puits, un forage, du photovoltaique et une éolienne. Niveau protéines une dizaine de poules, un coq handicapé qui tombe un pas sur deux, quelques lapins (la population dépend des évasions), deux ânes, deux chevaux et un vieux chien paralysé des pattes arrière. Au jardin le désert, mais un jour ca va pousser : y'a pas d'eau alors on paille, mais le vent souffle et dépaille ; on ne se décourage pas... Bientôt des céréales, des fruits et des olives.
Je pense qu'il y a de la place pour tout ici, mais bon on peut pas tout faire, c'est le temps qui manque.
J'oubliais presque, c'est un gîte Accueil Paysan, et y'a pas mal de passage.

Mes séjours :
Les wwoofers sont logés dans "la petite maison", une sorte de gîte pour six personnes. Un peu dur à chauffer mais quand même très confortable.

  • Du 10 au 22 décembre : j'ai fait un peu de tout. Construire des murs anti vent en palettes dans le jardin pour que la paille reste en place, faire des murs anti vent en entassant des souches de vigne, entretenir un peu la forêt, débroussailler de la ronce, faire un clapier sécurisé, ...
  • Du 3 au 21 janvier : "Tiens, la fin de la subvention au plantage d'arbre c'est le 15 janvier, on avait oublié ! C'est pas grave, on a qu'a planter 250 oliviers et 150 fruitiers à la bêche en 10 jours et à deux." Du coup j'ai fait pas mal de trous et planté pas mal d'arbres, maintenant on s'assied et on attend que ca pousse, dans 5 ans il y aura des fruits à gogo : cerises, abricots, peches, pommes, poires, figues, nefles, kakis, coings, noisettes, prunes, nashis et je suis sur que j'en oublie. C'était fatiguant (surtout de faire que ca) mais assez satisfaisant, ca donne un bon bilan carbone.
  • Du 21 au 26 janvier : je suis parti dans l'Aude a Quirbajou faire mon wwoof suivant sur le theme du fromage de chèvre. Mais le bouc a du être un peu long à la détente cet été et les chèvres avaient pas encore mis bas quand je suis arrivé. J'ai découvert qu'on ne peut pas traire une chèvre pleine. J'y retourne début mars.
  • Du 27 janvier au 24 février : retour à Opoul car on va construire une serre en bois (un menuisier est là une semaine pour nous former sur les machines à bois qui prennent la poussière). Une bonne semaine de dégauchissage, rabotage, tenons et mortaises avec un professionnel ; très formateur. Mais le mec est parti après une semaine, et on s'est retrouvés avec notre serre sous forme de bouts de bois entassés... On a mis deux semaines de plus à tout finir : assemblage, fondations, chevillage, fixation des chassis de fenêtre, toît, isolation en terre paille (mon coup de coeur : matériau gratuit, naturel, incroyablement isolant ; je le savais déjà, mais passer de la théorie à la pratique j'en ai eu les larmes aux yeux).
A part ca on a quand meme trouvé le temps de faire pousser quelques haies de palettes dans le jardin, et j'ai fait des trucs rigolos comme couper des arbres à la hache, plumer et vider ma première volaille (le vieux chien a mis fin aux jours du vieux coq au terme d'une poursuite haletante. Coq immangeable, paix à son âme), dépecer un renard au pelage magnifique (ma future casquette : une tête de renard) et aussi me forger un couteau. Je me sens comme Davy Crockett. Une semaine de plus et je posais des collets pour attraper des sangliers.

Julie est venue passer deux fois une semaine avec moi. C'était un séjour vraiment chouette.

Petit bilan (j'ai vraiment honte d'écrire ca mais pourtant il le faut) :

Bosser 8 heures par jour en attendant le weekend pour gagner de quoi acheter de la bouffe pleine de trucs qui ont pas l'air très bons pour la santé (de ceux qui la mangent et de ceux qui la produisent), se mettre un crédit sur le dos pour se faire construire une maison en trucs cracras, travailler pour payer sa voiture, avoir une voiture pour aller travailler, cautionner la mondialisation et le travail en chine parce que ca coute une fortune de faire autrement, donner des sous aux banques, à carrouf et aux assurances, vivre dans un monde régi par l'argent, vivre au milieu d'enjeux qui nous dépassent, je vous pose la question : mais ou va-t-on ?
On marche sur la tête c'est une évidence, mais ca demande une telle énergie d'oser penser qu'on pourrait faire autre chose de notre vie qu'on continue comme ca, de toute facon tout le monde le fait...

Pour moi la solution (comme j'ai pas envie d'organiser une révolution ni de tenter de convaincre des gens qui n'ont pas envie d'être convaincus) c'est de fuir. Puis d'être autonome, sans pour autant vivre comme un sauvage ni bosser 12 h par jour. Ca passe surement par la mutualisation des efforts, et donc par un collectif.

Le wwoof c'est pratique, ça aide à franchir un pas. Quand j'étais à Montpellier en train de préparer mon départ, ca avait l'air de paraitre un peu bizarre et décalé ce genre d'expérience (à situer quelque part entre l'homme de cromagnon, l'esclave et le rebelle d'into the wild ; un peu marginal quoi), presque de quoi me refroidir. Mais d'être au milieu de types aussi et encore plus marginaux, ca m'encourage à aller plus loin. Vus d'ici, la pieuvre du capitalisme et tous ses excès ne me paraissent plus qu'un mauvais souvenir, un souvenir ridicule, et un ridicule évident.

Maintenant j'ai presque envie de quitter le wwoof pour expérimenter des lieux où on peut vivre différemment (c'était mon dernier cliché promis). Donc ma prochaine étape : (re)joindre des collectifs autonomes pour me confronter un peu à la réalité de mes choix.

Quand j'ai trouvé un endroit sympa promis je vous fais signe :)


Au passage, un petit rendez vous début juin dans l'Hérault : http://collectifconvergence.blogspot.com/